Croquis (2)


RER C

— Nan, mais moi, je lui ferais sa fête à c’ui là !

— Sérieux ? Il s’est cru où le type ?

— Fais-voir, fais voir !

Les trois jeunes en baskets s’installent sur les banquettes maronnâtres du RER C répondant au doux nom de Greta. Sans arrêt jusqu’à Juvisy. Alternance verdure-béton aux fenêtres.

L’un d’eux sort un smartphone. Les lettres blanches de Facebook se détachent sur fond bleu. Ses comparses se penchent pour mieux voir. Ricanements.

— Nan mais j’hallucine. Il a vraiment écrit « Je t’m a la foli » sur le mur de ta meuf quoi. C’est du délire.

— Ouais, c’est abusé. Tu vas faire quoi ?

— Nan mais y a rien à faire les gars. S’il l’a mis dans son statut, c’est qu’il est trop minable pour le dire en face. C’est juste un gros naze.

Crissement de roues à l’approche d’une station. Une dizaine de voyageur migre vers la sortie. L’excitation qui flottait dans l’air retombe.

— Sinon, vous avez vu le match hier ?

 

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Croquis élaboré pour un après-midi stylistique de la SFT avec Hédi Kaddour.

Image de pdstahl

Croquis


White Head

Deux têtes blanches. Elles avancent péniblement pour atteindre le fond du compartiment. Regards perdus de droite et de gauche en quête des numéros inscrits sur leurs billets.

Après avoir immobilisé le flux de voyageurs quelques longues minutes, elle s’assoit. « Tu aurais pu trouver le moyen de mettre la valise plus près ! » Pas de réponse.

Calés avec raideur dans leurs sièges, ils dégainent tous deux leurs mots fléchés. On ne les entendra plus de tout le voyage.

 

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Croquis élaboré lors d’un après-midi stylistique de la SFT avec Hédi Kaddour.

Image de Bill Gracey

Crépuscule


Vespéral

Jaune tendre des champs de blé dans les ombres bleues du crépuscule

Fulgurances de l’esprit chevauchant une monture ailée

Rose fugace des nuages

Lignes subreptices

Derniers éclats de brillance avant le plongeon dans le noir intégral

Dans un clin d’œil blafard

La Lune se rit de notre désarroi face aux ténèbres

Écrit le 25 juin 2012 entre 19h15 et 22h30 – TGV Paris-Montpellier

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Image de .Luc.

La musique et la plume – suite et fin (?)


Reprise

Après une trop longue interruption, je reprends la parole sur ce blog pour terminer la série en cours.

La musique et la plume

C’est une rencontre poétique qui a eu lieu le 6 mai 2012 à Saint-Aunès.

Orélie Louvet, la talentueuse pianiste de l’association Évasion musicale a accompagné au piano une dizaine de textes issus de l’Atelier d’écrits animé par Carole Lilin.

Au programme musical de grands morceaux classiques (Mozart, Chopin, Bach…) agrémentés de quelques remarques sur les musiciens et leurs œuvres et puis, pour la partie littéraire, une dizaine de textes écrits par les participants à l’atelier d’écriture.

Étonnements

Pour la plupart, ces textes ont été écrits précisément en écoutant le morceau d’accompagnement. Étonnamment, cela se ressent énormément. Lors des répétitions, nous avons parfois tenté de mettre un texte sur un autre morceau, mais ça ne marchait jamais aussi bien qu’avec celui qui avait été entendu lors de l’écriture même.

C’était la première fois que j’écrivais en musique et j’ai été étonnée de découvrir de telles correspondances. Les son, les images mentales, les mots sur le papier. C’est un processus très naturel. Comme si la musique était faite pour ça, pour nous pousser à peupler de mots et d’encre les nuages acoustiques qu’elle offre à nos oreilles.

L’autre surprise, c’est d’avoir ressenti tant d’émotions à entendre certains textes lus sur ces morceaux. Émue jusqu’aux larmes, cela a été une expérience sans pareille.

Enfin, je me suis confronté aux difficultés techniques de la lecture à haute voix, par-dessus un instrument qui résonne puissamment. Comme cela, ça n’a l’air de rien, mais la lecture à haute voix est une discipline à part entière, avec un brin de théâtre/mise en scène qu’il faut apprendre à maîtriser : quand lever les yeux et regarder le public, quand hausser le ton, quand accélérer pour suivre le rythme du texte ? Toutes ces questions, je me les suis posées et j’ai tâché d’y répondre du mieux que j’ai pu. Je suis convaincue qu’il y a encore beaucoup de travail pour arriver à un résultat dont je pourrais être entièrement fière. Il faudra donc retenter l’expérience pour en avoir le coeur net.

Retrouvez tous les textes lus lors de cette rencontre délicate et harmonieuse à cet endroit.

 

Aimez-vous assister à des lectures publiques ? Quels conseils donneriez vous à une lectrice à haute voix débutante ? Laissez libre cours à votre inspiration dans les commentaires !

 

Image de TheMM

La musique & la plume – making of 2


Debussy a écrit ce morceau pour mettre en musique ce poème de Verlaine :

Clair de lune

Votre âme est un paysage choisi
Que vont charmant masques et bergamasques
Jouant du luth et dansant et quasi
Tristes sous leurs déguisements fantasques.

Tout en chantant sur le mode mineur
L’amour vainqueur et la vie opportune
Ils n’ont pas l’air de croire à leur bonheur
Et leur chanson se mêle au clair de lune,

Au calme clair de lune triste et beau,
Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres
Et sangloter d’extase les jets d’eau,
Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres.

Paul Verlaine, Fêtes galantes

La musique & la plume – making of 1


Clair de Lune

Il y a quelque temps, lors d’une séance de mon atelier d’écriture préféré, la consigne était la suivante : écrivez en musique.

L’animatrice nous a passé ça :

Et moi, j’ai écrit ça :

Éclats de vol

 Au début, c’est un jaillissement

Les flots s’élèvent puis s’écoulent en toute quiétude

La vie se façonne, préservée de tous les dangers, au sein du nid familial

L’oisillon apprend

 

Plus tard, aux côtés de son âme sœur, il part voguer paisiblement sur une mer d’huile

De son halo laiteux, la Lune leur accorde sa bénédiction

Au loin, le vacarme du dehors s’étouffe, relégué au second plan

C’est maintenant entre les deux silhouettes perchées sur le pont que la vie se joue

La houle leur tend les bras, mais les deux ombres se serrent l’une contre l’autre

Elles tiennent bon

La tête toujours bien haute quand l’éclaircie daigne pointer le bout de son nez

 

En ces eaux revenues au calme, c’est à l’intérieur que le tourbillon bouillonne

Une nouvelle vie va paraître

C’est alors qu’ils perdent pied, l’envers passe à l’endroit, les pics succèdent aux creux

Le duo s’y engouffre à corps perdu

Pour goûter cette ineffable féérie, qui les surprendra plus d’une fois

 

Puis, leurs gesticulations vigoureuses s’affaiblissent

Deviennent des effleurements lents et délicats

Papillons virevoltants qui se posent sur une accueillante corolle pointillée de rosée

Frêle ballet, succession d’éclats de couleurs à travers leurs ailes diaphanes

Dans un sursaut, quelques menus battements agitent encore leurs ailes chamarrées

Ultime envol contre le bleu implacable du ciel

Pour y imprimer la polychromie de leur existence

Suspendue dans les airs dans une dérive infinie

 

La suite au prochain épisode…

Image : Clair de Lune de Punk Jazz

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Les cailloux


Cailloux

Rêvé cette nuit que mes dents se cassaient, s’effritaient en mille morceaux,

Comme une masse de petits cailloux qui viendraient remplir ma bouche.

Bientôt impossible de parler, en route vers un étouffement inexorable.

Com-cailloux, Mu-cailloux, Ni-cailloux, Ca-cailloux, Tion-cailloux

 

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Le chemin de l’arbre


Alexandre Hollan au musée Fabre

Des arbres dessinent leurs silhouettes sombres sur les murs blancs du musée.

L’encre se fait sève, le feuillage se fait tache et le ciel,

étendue immaculée aux teintes parfois grisâtres,

s’imprime violemment sur les rétines.

Puissance et vibration.

Le souffle du vent murmure à mes oreilles.

 

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